La première Mairie de Taverny: Emblème de la République

par Joël Périé de La Manine pour le compte de Si Taverny m’était conté ! sur l’ancienne mairie menacée de destruction par la ZAC « les Quartiers des T »

Taverny. Place Charles de Gaulle. Les premiers rayons du soleil printanier viennent inonder la façade blanche d’une grande maison. Les passants les plus matinaux pressent le pas en direction de la boulangerie en quête de viennoiseries pour le petit-déjeuner dominical. Ils passent devant ce grand et fier bâtiment, pour la plupart sans savoir que l’édifice fut … la première maison communale de Taverny, il y a de cela 167 ans.

Octobre 1845. Se tenant debout, main droite tendue, le Baron Denis Rouen des Mallets prononce le serment devant son conseil : « Je jure fidélité au Roi des Français, obéissance à la Charte constitutionnelle et aux lois du Royaume ». Le Seigneur des Mallets, propriétaire du Château de Bellevue, devient maire de la ville.

2 décembre 1851. Coup d’état : Le Président de la République, Louis Napoléon Bonaparte, devient l’Empereur Napoléon III.

Taverny, 1855. Accompagné de Laure, sa mère, le jeune Benjamin Godard qui vient d’avoir 6 ans passe devant cette grande maison blanche, rue de Paris, appartenant à Monsieur Duplessis, marchand de vin et tenant de bal. Il ne le sait pas encore mais l’édifice sera la première mairie de Taverny.

Laure Du Val Godard
Benjamin Godard à 10 ans
Benjamin Godard à 13 ans

Son père, Auguste Toussaint Godard, vient d’installer sa famille sur les hauteurs de Taverny au Château du Haut Tertre à deux pas de Notre-Dame de Taverny. Succédant à Rouen des Mallets et à Auguste Bontemps, l’industriel parisien prospère devenu tabernacien occupe la fonction de maire : « Je jure obéissance à la constitution et fidélité à l’Empereur ». Auguste occupe également la fonction de juge au Tribunal de Commerce et est Chevalier de la Légion d’Honneur.

Auguste Toussaint Godard, Maire de Taverny de 1855 à 1859

En prenant ses fonctions d’édile, Auguste Godard a une préoccupation : il lui faut trouver une bâtisse qui pourra servir de mairie pour réunir son conseil, conserver les archives et être l’adresse officielle pour la réception des décrets. L’habitude avait été prise d’installer la mairie au domicile du maire. Et puis, l’ancienne maison du Notaire Hébert (actuellement laboratoire d’analyses rue de Paris) ne lui convient pas. Il y a bien cette grande maison de Monsieur Duplessis qui ferait l’affaire. Ce bâtiment construit avant 1830 et modifié en 1832 est solide et surtout lui paraît spacieux.

C’est donc une affaire conclue : la municipalité achète l’édifice pour 14 000 francs. Paraissant simple, la chose ne fut pas aisée pourtant pour le maire : en effet, à l’annonce de cet achat, la population lance une pétition contre ce projet. La mairie coûterait plus chère que  ce qui est prévu. Et puis surtout, cette ancienne salle de bal pose des problèmes de moralité. Décidément, les Tabernaciens n’en veulent pas : 15 000 francs de travaux supplémentaires pour un coût total de 25 000 francs (déduction faite de la vente de l’ancienne maison du notaire).

La devise républicaine inscrite sur le fronton de la mairie
Le drapeau tricolore flotte devant le campanile horloge de la mairie

Juillet 1857. L’Evêque de Versailles vient bénir la mairie.

Août 1857. Première réunion du conseil sous la présidence d’Auguste Godard.

Septembre 1857. Installation de la classe des garçons puis de celle des filles. L’instituteur et l’institutrice sont logés dans les appartements du premier étage de la mairie.

Après le départ des écoles, une des salles deviendra la salle des mariages.

Qui aurait pu penser que cette maison d’un marchand de vin et tenant de bal allait devenir pendant près d’un siècle l’emblème de la République ?  Vétuste et inadaptée pour les services municipaux compte tenu de l’augmentation de la population tabernacienne, c’est en 1948, à la Libération, que la mairie sera transférée à la « Justice de Paix » (actuellement Conservatoire de musique).

Sous le regard du portrait de Benjamin Godard accroché sur le mur de la salle du conseil, c’est avec une certaine émotion que le maire Emile Sehet réunit pour la dernière fois son conseil en 1947 dans cette vénérable maison achetée par Auguste Godard.

Benjamin Godard, Auteur de près de 400 oeuvres musicales

A Taverny, la Mairie Ecoles Poste est l’emblème de la République Française.

Du haut de ses 200 ans d’existence, elle a vu 8 maires se succéder, de nombreux conseils municipaux se réunir, des élèves suivre leur classe, le bureau de poste « Hôtel de ville » recevoir la population. De nombreux mariages y furent célébrés.

Elle a été aussi le théâtre et le témoin de l’Histoire de Taverny gravée dans la mémoire de sa pierre et de celle des anciens tabernaciens : depuis l’installation de la nouvelle mairie en 1857, la fête se tient sur la place :

  • Début 1900 avec l’attraction du lâcher du gigantesque ballon libre réunissant l’ensemble de la population lors des fêtes patronales. Les personnalités de Taverny sont invitées par le propriétaire du ballon à s’installer dans la nacelle :

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Concours de musique, bals, premières courses vélocipédiques du village
  • Le premier cinéma de plein air avant La Gaieté et le Studio 207.
  • L’Exposition Agricole et Horticole de 1936.
  • L’entrainement des pompiers sur le portique de bois leur servant de tour d’exercice :
La tour d’exercice en bois des pompiers de Taverny
  • Le premier mariage célébré par Madame Cardon, chef de la Délégation Spéciale dans le Taverny libéré (23 septembre 1944).

Sur un texte de Joël Périé de La Manine pour le compte de Si Taverny m’était conté !

Sur une musique extraite des Barcarolles de Benjamin Godard.

Crédits photographiques :  avec l’aimable autorisation des collections privées d’Alexandre Simonnot Godard (Album de famille d’Auguste Godard) et de Joël Périé de La Manine (Collection des cartes postales tabernaciennes).